Il régnait comme un air de déjà-vu au chapiteau de Mythos ce lundi. Comme l’impression étrange que, le temps d’un concert, je vivais dans le film que j’avais tant apprécié à sa sortie, Guy d’Alex Lutz. L’étrange sensation d’apporter par cette expérience un nouveau regard sur le film, plus sincère et moins complaisant, que si la réussite de ce concert tenait par son talent musical, il faisait davantage grandir un moi un regard bienveillant au Guy Jamet imaginaire qui le temps d’un instant avait pris les traits d’Alain Chamfort. Car si Guy Jamet n’est que fiction, que Dadidou n’a jamais joué sur les pistes de danse des années 70, je dois dire que de mon point de vue, peu de chose sépare la fiction du mythe.
Et Chamfort montant sur scène en dansant au rythme de La fièvre dans le sang ; cette image prend grâce à mes yeux purement dans sa forme artistique, dont la réalité ou la fiction ne viendrait pas entacher le plaisir visuel et musical de cette scène. N’étant pas plus savant de la carrière fictive de Guy et que de la carrière musicale de Chamfort, ne connaissant de chacun que leur plus gros titre, Dadidou pour l’un, Manureva pour l’autre, je me plais à découvrir la suite dans le concert enivré de cette suspension de ma crédulité. Si Guy n’a pas réussi dans le propre espace de son film à transpercer le toit de verre de son plus gros succès, Alain lui continue à jouer et à jouir de sa liberté dans son espace de création musical. Il prend plaisir à jouer dans sa « tournée de petites salles » qui lui permettent de déployer tout son registre, de ses chansons connues qui n’ont pas tout à fait traverser les générations, de son plus gros succès Manureva qui traversa toutes les générations, à son dernier album L’impermanence. Et à chacune d’elles un public attentif et ravi. Car si Guy était ce récit sur l’industrie musicale qui illumine ces vieux artistes des années 70 et 80 de leur gloire passée dans la lumière des plus grands succès, re-jouant inlassablement l’unique chanson que le public demande, le film se concentrait sur l’artiste uniquement et non le collectif que constitue un concert, la scène et le public.
Même si Manureva était attendu, elle joua en dernière, laissant au milieu une proposition musicale variée, au plaisir d’un artiste et d’un public.
✍️ Par Alban Lainé-Battegay
Photos © Nico M