La foule est assise. Attentive, elle attend son homme. Albin de la Simone arrive en costume avec un sourire tranquille. Il s’installe au piano, pose ses mains sur le clavier et, sans plus tarder, commence à jouer. Sa voix emplit l’espace. Une voix gracile qui s’élève. Le spectacle commence. Non, pas le concert, le spectacle. Il n’y a pourtant pas de mise en scène particulière, pas de costumes, pas de fioritures. Je découvre l’artiste pour la première fois même si son nom évoquait déjà quelque chose de familier dans mon esprit. J’arrive donc l’esprit ouvert, curieux de ce que je vais découvrir. Et la magie opère. Dans ses paroles, dans le creux de sa voix se forment ici une forêt, là un lac ou une route. Les personnages arrivent, s’animent. C’est de là que provient la dénomination spectacle. Une prestation qui donne à voir. Un couple de paroles et de musique qui dansent, virevoltent dans vos têtes. Une scène hors du temps devant vos yeux. Les artistes qui vous donnent à visualiser sont précieux. Albin de la Simone est de ceux-là. Une perle rare.
Après quelques chansons, l’homme est rejoint par deux femmes, deux musiciennes, une violoncelliste et une violoniste. Elles arrivent silencieusement et commencent sans un mot l’accompagner. Leur complicité décuple la magie du moment. Le contraste est saisissant, la musique épurée d’Albin de la Simone s’en trouve enrichie. L’homme continue de tenir sa mélodie si poétique, douce, presque nue et les cordes la soutiennent, l’épaulent, s’entremêlent pour créer une harmonie unique. Quelque chose d’aérien.
Le texte aux significations multiples dénote sur un chemin musical presque enfantin, tant il est pur. Sa parole se promène, mène, sème le spectateur dans son monde. Un monde égaré comme par erreur. Un monde où le spectateur se sent bien. Le chant berce, il vous transporte au loin d’une contrée à l’autre car les artistes sur scène sont polyvalents. La violoniste joue aussi du clavier, les deux femmes chantent, Albin de la Simone joue avec l’outil numérique pour former, déformer des ambiances. Sous le chapiteau, tout le monde est heureux. Le contact avec le public s’établit progressivement. La foule participe à la création des chansons. L’homme semble heureux, aimer ce contact si particulier avec le public. Il se surprend à esquisser quelques pas de danse et revient après un énième rappel avec une reprise de Baschung : Station Service. Cette chanson fait partie d’un hommage à Bashung auquel il a participé … peu importe. Sa voix est là et l’enchantement est de retour, au rendez-vous. Nous sommes conquis.
Alors oui, ce n’est pas le concert où tout le monde est en furie, tout le monde transpire. Justement, le tour de force n’en n’est que plus grand. Arriver à captiver l’auditeur, grand défi relevé, sourire au coin des lèvres. Albin de la Simon est un chanteur à part. Une voix indéfinissable. Une musique qui apaise, ondule, leurre, charme tour à tour. Les réactions sont révélatrices « au début, je trouvais un peu trop doux mais la deuxième partie était captivante ». Le mot de la fin sera accordé au public « Un seul regret, c’était trop court ».