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Mythos 2013 Texte

Des mots sur des maux – au bord du gouffre, Cédric Gourmelon

Le spectacle débute sur un fond sonore peu commun. Une émission de radio en anglais parlant du sida aux Etats-Unis et des clichés autour de ce problème. Cédric Gourmelon, dans la pénombre, fume calmement et entre dans son personnage, celui de David Wojnarowicz, artiste américain décédé du sida en 1992. La radio s’éteint, il s’assoit. Le travail sur les mots commence. Un rythme rapide sur un ton calme pour parler de thèmes difficiles tels que la violence, la prostitution, la drogue. Le ton choisi, la poésie des mots, ainsi que les pauses emplies d’émotion rendent l’interprétation de Cédric Gourmelon saisissante. Le spectateur comprend que les mots servent de thérapie au personnage. Il dira même à la fin du spectacle que mettre des mots sur des sensations est sa façon de s’accrocher à la vie.

Puis, le ton s’élève. Des citations de Close to the knives (au bord du gouffre), l’ouvrage qui a inspiré le spectacle, sont présentées au public. On y ressent une réelle haine pour une société américaine intolérante et insensible. Une haine pour les propos (in)volontairement hypocrites de certains politiciens sur le sida. Cette scène transporte le spectateur qui est pris dans un tourbillon de paroles, de musique et d’images teintées de rouges projetées sur le fond de la scène. Cet aspect artistique est essentiel, car le spectateur se retrouve plongé dans les sentiments que lui envoie Cédric Gourmelon et l’on ressent la pression de la société qu’il décrit. Cette même société déforme l’art selon lui, car elle influence l’imagination qui n’est alors plus pure. Une expression marquante illustre bien cette idée : la société offre une « existence préfabriquée ».

C’est un spectacle qu’il faut voir, notamment grâce une prestation remarquable de Cédric Gourmelon qui a une réelle présence scénique.

 

Clémentine Richer