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Mythos 2014

« J’habiterais bien dans un mille-feuilles A4 »

Il déambule parmi nous avec son casque de chantier, scrutant le public puis s’éclipse pour s’équiper d’un micro. Le spectacle commence. Il s’agit pour Jérôme Rouger d’arriver à intégrer le public dans sa salle de classe de l’école ambulante d’agriculture. Le cours ancré dans un cadre complètement rennais se voit introduit par une personnalité de marque, le directeur artistique du festival, Mael Le Goff, qui se retrouve à devoir improviser sur scène l’inauguration de cette école d’un nouveau type. Le cours peut commencer.

Cours magistral

Le cours. Pardon ? Un cours ? Mais, mais… je croyais qu’on devait assister à un spectacle ? On m’aurait donc menti ? Sortant tout juste de l’université, je devrais donc me replonger de sitôt dans une ambiance studieuse ? Et imaginez donc la terreur de ceux ayant quitté les bancs de l’école il y a bien longtemps et qui se retrouvent de nouveau devant cette créature étrange et non moins fascinante qu’est… le professeur. Je dirais même plus, le directeur. Et pas n’importe lequel. Le directeur de l’école ambulante d’agriculture, s’il vous plaît. Une sommité dans son domaine, pour lequel nul œuf, pour lequel nulle gallus gallus domesticus n’a de secret. Conscient du privilège de pouvoir assister à ce premier cours, les élèves écoutent attentivement. Sans prendre de notes cependant, ce qui leur vaut de se faire copieusement réprimander par leur directeur.

On peut dire que face à son auditoire, notre professeur trouve une assemblée pour le moins dissipée, tellement elle s’esclaffe à chacune de ses phrases. Pourtant tous ses clichés qui font se tordre de rire certains sont pour plupart vérifiés et c’est là que repose la force du texte et du comédien. L’humour sérieux est un genre d’humour très particulier qui permet à l’acteur talentueux de pouvoir faire s’esclaffer le public sur des thèmes sérieux et dont l’approche est quasi-véridique. C’est là la preuve d’une habileté, d’un don hors-norme.

Le rire intellectuel

Le public rit à chacune des interventions du directeur. Mais bien que nous soyons dans un spectacle, cela nous permet-il de rire de tout ? Oui, si l’on rigole de tout de la même façon. Or ce n’est manifestement pas le cas. Volonté de l’auteur d’aborder des sujets polémiques sous couverture comique ? Sûrement, et nul ne peut nier le brio de la démonstration gallinacéenne. Mais la composition de l’assemblée du premier cours de l’école d’agriculture ambulante jouerait-elle sur les réactions aux répliques ? Sûrement aussi.

Ainsi rares sont les spectacles où l’on peut à la fois faire réfléchir et faire rire. Un art rare et ô combien difficile dans lequel notre directeur préféré s’est ce soir distingué. Comment appeler un homme qui réussit à faire caqueter son public ? Un maître, cet homme réussit là un tour de force grâce à sa mise en scène et un humour hors-pair, il surprend, il arrive là où on ne l’attend pas. Hier soir, Jerôme Rouger nous a donné une véritable leçon.