Cette phrase est totalement incompréhensible pour qui n’est pas initié. Elle semble construite avec la mise bout à bout de morceaux de phrase perdus, laissés pour compte aux bords de lèvres hésitantes, et pourtant elle vous semble familière. Là est la force de Murielle Schreder ; elle nous entraîne ça et là, nous transportant du traditionnel « il était une fois … » à un bar sous-marin en passant par une course de bobsleigh. Envoûtés, on se laisse guider, porter par sa voix. Les bribes de récit s’enchaînent, semblent sans queue ni tête mais peu à peu le décor se dessine, les liens se tissent, les illusions disparaissent et l’histoire éclate enfin au grand jour.
C’est l’histoire de bottes bleues. Non, du petit Chaperon Rouge. Ou plutôt de sa sœur. A moins que ce ne soit de sa Mère grand ? Et le Loup dans tout ça ? Pour résumer, c’est une histoire impossible de tous les possibles. Murielle Schreder réveille en nous les enfants endormis et alerte dans le même temps les adultes avertis. Le merveilleux côtoie, s’empare de références tragiques. Artiste polyvalente, Murielle Schreder retourne aux sources du conte et joue les troubadours. Elle s’empare de son instrument et avec autant de cordes à sa harpe, elle conte, raconte, déclame, se pose, chante en allemand, en anglais, en français sans que le spectateur en perde une seule miette. Le jeu des lumières forme un véritable duo, complétant la parole et la musique de Murielle Schreder. Le décor semble simple : trois bandes de tissu froissé au fond de la scène… mais ne vous laissez pas abuser ! Ce ne sont pas trois bandes d’étoffe, ce sont tour à tour des arbres dominants, des ombres inquiétantes, des vagues incessantes. Au début, on reste dubitatif, dans l’expectative, un peu sur le qui-vive… Oser toucher à ce grand classique du conte à Mythos ? Mais, quelques notes plus loin, sa voix captivante, sa harpe berçante, son jeu étonnant, des lumières enivrantes nous emportent. L’esprit s’évade, construit, s’instruit dans l’imaginaire de Murielle Schreder. Nous ne sommes plus cette petite trentaine de personnes assises dans un cabaret au Pôle Sud, nous sommes avec elle. Murielle Schreder nous guide par voix, nous perd dans son ensorcelante musique pour nous retrouver au détour d’un chuchotement. Nous la suivons avides de ses mots, suspendus à ses lèvres.
C’est dans cette soirée que j’ai trouvé l’esprit de Mythos. Un monde que je ne soupçonnais pas se dessine devant mes yeux ébahis. Un monde de créatures fantasmagoriques, de situations abracadabrantesques, de jeux de mots. Un monde né de la parole, façonné par elle, existant par et pour elle. Un monde à part mais tellement présent. Celui-ci se crée grâce à une narratrice fabuleuse, totalement dans son élément, qui peint en direct ces scènes fantastiques. Le conte était au rendez-vous, il a créé le mythe. Un mythe qui gagnerait à être plus connu. Ce spectacle n’était que la 2ème représentation de « once upon a boot » alors que le texte existe depuis quelques années. Il n’appartient qu’à vous de réveiller ce merveilleux conte endormi.
A vous d’écrire l’histoire et de la partager.