Mythos, on le sait, joue de la diversité des scènes qui accueille ses spectacles. Ces différences participent d’ailleurs à la richesse du festival, camaïeu de l’art oratoire, mais également du voir.
C’est à distance des strass, tant géographiques que matérielles que se situe le spectacle (8) Liaisons.
Nous voilà donc partis vers Liffré, loin du Thabor et son Magic Mirror, pour un décor bien plus épuré.
Le lieu du rendez-vous n’est autre que le parvis de la mairie. C’est en fait sur scène que nous nous retrouvons, car aucun décor n’est posé, l’action se déroule autour de la place de l’église.
Equipés d’un casque audio, nous sommes pendant 50 minutes les spectateurs et auditeurs insistants des discussions de 4 personnages. Toujours par deux dans ce que nous pouvons appeler le « champ », les acteurs déambulent dans un espace que nous sommes également invités à investir et à parcourir, pour suivre visuellement les échanges des personnages.
Du voyeurisme ? Le pas pourrait être franchi.
Les discussions, que nous entendons parfaitement grâce au casque, confirme l’accusation. La mise en scène propose des discussions intimes entre les quatre acteurs, deux femmes et deux hommes. Les confidences des uns nourrissent les discussions de vieux couple(s), ou bien de rencard amoureux des autres. Des conversations somme toute intimes sur les sentiments, les égarements et les hésitations des personnages. Des questionnements aussi : le mariage détruit-il l’amour ? Le « couple libre » s’oppose-t-il au couple contraint ? Peut-on manger des huîtres quand on est bouddhiste et végétarien ?
(8) Liaisons offre à voir ce dont seules les femmes raffolent, nous dit-on : les ragots, les « on-dit » les secrets, les aveux. C’est tout cru dans la bouche. Un Facebook live d’illustres inconnus. Presque gênant. Nous scrutons, observons, entendons. Le public, travesti en passants, est un espion tout sauf discret. Peu importe, c’est un spectacle, une comédie, ce n’est pas vrai. La réalité virtuelle à peine virtuelle est un peu gâchée (ou l’illusion volontairement soulignée) par le texte et le jeu, parfois caricatural. Toutefois, le réel n’est pas loin. On se prend au jeu, les histoires de ces anonymes nous passionnent. La vérité est peut-être difficile à avouer mais tout le monde aime ces histoires, non ? Cette indiscrétion et cette curiosité qui peuvent nous habiter, caractérisent le spectateur. Elles sont grossies par l’absence de contraintes. Cependant, un œil attentif observerait une mise en abîme du spectateur, lui aussi scruté par de « vrais » passants, qui s’interrogent sur ces gens qui fixent les personnages. Curieux non ?
Photo © Philippe Remond