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Mythos 2023

Vendredi : Soirée pyjamaPapaconstantino

Un titre presque aussi long que les files qui s’agglutinent aux différents bars du Thabor pour revenir sur la première soirée de la 26ème édition du Festival Mythos et sur le concert sous le chapiteau de Johan Papaconstantino.

Cela fait toujours un peu étrange de se retrouver quelque part d’où l’on croit être parti il y a peu. Revenir sous les lanternes rouges des marronniers du Thabor c’est un peu ce que ça procure.

Petit tour du propriétaire avant de rejoindre le Cabaret Botanique où le voyage dans l’espace et le temps s’annonce d’envergure en ce premier vendredi soir. Du reggae allemand sierra léonais de Patrice, aux Balkans provençaux de Johan Papaconstantino en passant par les soirées électro des années 80 des platines d’Etienne de Crécy.

Le parc du Thabor est noir de monde bien qu’éclairé par la lune elle aussi bien remplie, et bientôt les flashs des boules disco du magic mirror.

A l’arrivée dans celui-ci justement, avant qu’entre en scène Papaconstantino, on peut encore circuler fluidement au rythme de la playlist d’attente: ‘’maintenant ou jamais’’, de Catastrophe, ça pose l’ambiance.

La fosse est encore parsemée. Comme toujours, il y a plusieurs profils. Celui qui s’adosse au pilier du chapiteau et regarde dans le vide, convaincu qu’il a la meilleure place, ces groupes d’ami.e.s à deux pas de la scène, se racontant leur journée sans bouger d’un pied, et ces discussions tout autour, de gens toujours attablés, qui se lèveront une fois les premières paroles prononcées.

Ce à quoi on assiste avant le début du concert, c’est aussi à un ballet ignoré et pourtant bien millimétré. Sur scène, une vingtaine de mains s’agitent, des dos se plient, des badges s’entremêlent aux câbles noués, le tout dans un nuage de fumée. Scénographie des invisibles qui savent pourtant bien ce qu’ils font et où ils vont… comme les fourmis  sous le parquet du chapiteau qui, on n’en doute pas, doivent se demander ce qui peut bien se passer là- haut. Si tant est qu’il en reste encore quelques-unes.

Celui qu’on attend ce soir s’est fait connaître par une reprise, celle des mots bleus, de Christophe, auxquels il est venu ajouter sa touche. 

A l’écoute de son premier  album  (‘’Premier degré’’ sorti en 2023) on peut se demander où l’artiste va, si on retrouve sa ‘’touche’’ justement, on a du mal à faire sortir un titre du lot, et à le garder en tête.

Il n’empêche que ses mots bleus à lui ont été la bande son de plusieurs étés et de fins de soirées arrosées de plusieurs générations, renouvelant ainsi un hymne, et en en faisant par ses influences à la fois méditerranéennes et électroniques un ‘’mélange de couleur, qui vient d’ici et d’ailleurs’’ (à quand Yannick Noah à Mythos?).

Papaconstantino a donc beau être apparu assez récemment sur la scène française, son nom et sa voix tiraillée et autotunée évoquent déjà un peu un sentiment de nostalgie.

Passons aux choses sérieuses.

21h30. Les technicien.e.s s’effacent petit à petit, tandis que la reine des fourmis vient déposer au centre de la scène la guitare de l’artiste. La guitare ou plutôt le bouzouki, luth grecque ornée de gravures florales en symétrie.

21h33. Un concert qui commence à l’heure ne peut pas être un bon concert…un homme en profite pour se dandiner sur la playlist qui tourne encore, il profite de trois bons mètres carrés qui on l’imagine vont se resserrer.

21h36. Des premières lumières s’éteignent, autant de cris sont lancés au hasard. Si on tourne la tête on peut voir que la fosse s’est remplie, les côtés ont rejoint le centre, les cercles d’ami.e.s regardent maintenant dans la même direction et il y en a un qui est…toujours adossé à son pilier. On peut entendre ‘’on essaye d’aller dans les petits trous là’’ des gens se faufilent, ce soir comme beaucoup pour beaucoup déjà cette semaine, la billetterie annonce complet.

21h40. Noir complet. Fumée. Le synthé fait sortir des bruits qui font penser au champ d’un oiseau, comme ceux qui sont ressortis sous le beau temps de l’après midi qui vient de se terminer. Déjà un téléphone en film un autre filmant la scène où l’artiste entre sous les applaudissements.

Tout de suite le bouzouki, les sonorités balkaniques et électroniques, se mêlent à une voix éraillée et nasillarde, marque de fabrique de Johan Papaconstantino.

A sa gauche, un musicien  et ses instruments traditionnels, djembé et autres cymbales. A droite un claviériste au synthé, scénographie simple qui résume bien l’univers musical de Papaconstantino.

Des coups se tordent, des mains se lèvent, tapent en rythme et ondulent mielleusement.

Quelque chose prend s’est indéniable.

Mais on peut se demander si ce n’est pas plus dû au fait de se retrouver sous le chapiteau du magic de mirror, à y danser pour la première fois depuis un an après un jour si ensoleillé, plutôt qu’à ce que l’artiste transmet.

Comme non content, on se demande si en passionné de la musique qu’il a l’air d’être (il manie son instrument à merveille) Papaconstantino ne préférait pas jouer dans sa chambre sans s’arrêter, ou sous un ‘’beau temps’’, comme il le chante, avec ses ami.e.s.

Vêtu d’un marcel sous une chemise de nuit en soie, le chanteur, aussi artiste peintre, demande souvent avant de commencer un morceau ‘’celle là vous la connaissez?’’ des ‘’ouiiiiiii’’ s’élèvent mais peu de lèvres entonnent les paroles à tue-tête.

A plusieurs reprise avant qu’on ne l’entende les chanter des ‘’les mots bleus!!!!’’ auront été criés. Sans doute aurait-il dû commencer par ça, puisque une fois commencé, le titre a fédéré et ouvert l’attention pour les deux dernières chansons. Donc finalement non, car malgré un set d’une presque unique tonalité, et un Johan Papaconstantino semblant peut être mal luné, ces mots bleus pour finir le concert laisseront dans les souvenirs la trace d’un beau moment passé.

La soirée n’est cependant pas terminée, et le festival ne fait que commencer…

Ewen Dubée
Photo © Magali R