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Mythos 2022

Charlotte Cardin, hypnotisante de talent

La québécoise à l’allure intrigante a converti le public à son art, elle a créé « ce truc » auquel on ne s’attendait pas.

Le soleil d’un samedi d’avril a réchauffé le public sous le chapiteau du cabaret botanique pour la venue de la québécoise charlotte Cardin. Un charisme scotchant, une voix incroyable et des textes justes : c’est définitivement la musique qu’on a célébré sous le Magic Mirrors. Un concert marquant de cette « main girl » durant lequel le courant a clairement circulé entre l’artiste et son public.

Hier, la jeune chanteuse canadienne, révélée à 22 ans par un télé-crochet québécois, nous a prouvé que sa venue n’était pas le fruit du hasard et que son talent était d’une étendue sans nom. Elle passe le rideau, cheveux plaqués, t-shirt oversize à l’effigie de Miles Davis. Le Cabaret Botanique est près, le concert commence. Assez vite le public se prend au jeu des chansons au départ douce dont les refrains font tourner en rond les nuques.

Il fait chaud, dehors le soleil frappe et le l’humidité monte sous le chapiteau. La chanteuse enlève son t-shirt, elle est fine, son charisme effrayant, tel un alien, ses longs bras nous prennent dans son monde de paroles tristes mais sincères.

Sa voix ! Sa voix est indescriptible, un mélange de graves rappelant ceux d’Amy Winehouse, et d’envolées à la London Grammar. Mais ça ne suffit pas à définir ce grain unique. Quelque chose se passe, c’est indéniable. La chanteuse fixe le public dans les yeux et emporte les âmes. La température monte, lumière orangée, Charlotte Cardin tourne sur elle-même et s’enlace sensuellement.

On a l’impression de déjà la connaître tant être passé à côté serait une grave erreur.

Elle chante Scorpio season. Et un scorpion, s’en est véritablement un. Sourcils froncés, pupilles vertes, elle maîtrise son élément et sait piquer là où ça fait du bien.

Tournant dans la track-list. Charlotte Cardin entame un instant plus intime, c’est elle qui le dit, mais là aussi, elle convainc. Elle s’arrête parfois, plaisante. Quelque chose se passe. Dans les moments de pause, le silence du chapiteau est assourdissant « ça me gêne » dit-elle « d’habitude il y a au moins un ver qui casse dans le fond de la salle », là, rien, pas un bruit. C’est qu’elle nous hypnotise.

Perturbée, elle reprend sa guitare, se trompe et rit, nous dit d’oublier ce moment, nul doute que personne ne le pourra. La salle applaudit, les sourires gravés aux lèvres, peu de cris, simplement l’envie que ça continue.

Elle chante sun goes down, chanson écrite pour un ami perdu à un moment de sa vie, elle nous cueille et on se perd à notre tour. Ces textes ne sont pas des mots mis bout à bout à l’aveugle, elle décrit personnellement l’universel. Ses chansons sont des hymnes comme Anyone who loves me, hymne qu’elle dédie aux femmes, à leur beauté et aux défis qu’elles relèvent chaque jour.

Sa voix déchirée et déchirante n’est pas qu’apaisante et chargée d’émotions, elle peut aussi se lever, renaître de ses cendres. Charlotte Cardin est un phœnix et on comprend mieux le nom du single dont son premier album porte le nom : phœnix.

Multi talentueuse et multilingue, Charlotte Cardin nous offre quelques morceaux en français : je quitte, un ne me quitte pas revu à la sauce québécoise. Elle reprend aussi un titre de Daniel Bellanger, auteur compositeur interprète québécois, qu’elle nous invite à aller découvrir. La salle danse sur ce morceau, l’artiste saute, une énergie enchanteresse sort de son corps de danseuse classique.

Sur meaningless on devine les blessures de l’interprète, « i don’t want to live » chante-t-elle. Une chose est sûre, ce sont des « i don’t want to leave » qui résonneront dans les esprits en fin de concert. Le public n’est plus à conquérir, scotché dès le premier morceau, l’artiste prouve que sa place est sur une scène, et cela pour longtemps !

Puis elle se faufile sur son piano, moment de douceur après son « sex to me » qui réchauffe encore un peu plus le Magic Mirrors. Après un rappel, on sent déjà la nostalgie d’un beau moment passé monter en nous. Charlotte Cardin remercie le public, son public. On lit sur ces lèvres : à bientôt ! Et oui, on espère la revoir vite. Charlotte Cardin nous aura définitivement accroché au bout de ses mouvements harmonieux et de sa maîtrise vocale digne des plus grandes stars de la pop mais pas seulement.

« Il y avait ce truc » me dit Pauline au sortir du chapiteau, sous le soleil, on voudrait que ça continue. Pour ma part, j’avoue, je suis un peu tombé amoureux.

Ewen Dubée
Photo © Théo Oster